Cession de deux établissements à un même cessionnaire : une cession unique d’entreprise ?
Pour le calcul des seuils d’exonération des plus-values en fonction de la valeur des éléments cédés, constitue une transmission unique d’entreprise individuelle, les cessions à un même cessionnaire constatées par deux actes notariés portant sur le même fonds constitué d’un établissement principal et d’un établissement secondaire, dès lors que ces établissements incluent la même dénomination commerciale, sont exploités sous la même enseigne et sont enregistrés au registre du commerce et des sociétés sous le même numéro Siren.
Une exonération totale ou partielle de la plus-value selon la valeur des éléments cédés. Aux termes de l’article 238 quindecies, I du Code général des impôts (CGI), dans sa rédaction alors applicable à l’époque des faits jugés ci-après, les plus-values réalisées dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole à l’occasion de la transmission d’une entreprise individuelle ou d’une branche complète d’activité sont exonérées pour la totalité de leur montant lorsque la valeur des éléments transmis est inférieure ou égale à 300 000 € ; et pour une partie de leur montant lorsque la valeur des éléments transmis est supérieure à 300 000 € et inférieure à 500 000 €. Ces seuils ont été portés respectivement à 500 000 € et 1 M€ pour les exercices clos depuis le 31-12-2021 (loi de finances 2021-1900 du 30-12-2021, art. 19).
Pour le calcul de ces seuils, en cas de cession à une même date et à un même cessionnaire, d’une entreprise comportant plusieurs activités distinctes, le contribuable peut-il se prévaloir du caractère théoriquement distinct de ces activités ? Le juge a répondu par la négative.
Les faits. Une entreprise a cédé à une société, le 13-9-2017, par deux actes notariés, un établissement principal et un établissement secondaire moyennant des prix de, respectivement, 280 000 € et 140 000 €. Dans sa déclaration de résultat souscrite au titre de l’exercice clos le 13-9-2017, date de cessation de son activité, l’entreprise a placé la plus-value sous le régime d’exonération totale prévu au 1° du I de l’article 238 quindecies du CGI. L’administration fiscale, à l’issue d’un contrôle sur pièces, a remis en cause cette exonération, estimant que la plus-value relevait du régime d’exonération partielle prévu au 2° du I de l’article 238 quindecies du CGI compte tenu de la valeur des éléments transmis.
La décision. Le juge relève qu’il résulte de chacun des deux actes notariés du 13-9-2017 que les cessions ont, toutes deux, porté sur un fonds artisanal d’achat, de vente de fleurs, de confection de compositions florales et accessoirement de vente de tous produits et objets liés à l’art floral constitué d’un établissement principal et d’un établissement secondaire incluant la même dénomination commerciale. Il ajoute que les deux établissements, exploités sous la même enseigne, sont enregistrés au registre du commerce et des sociétés sous le même numéro de Siren. Il décide, dans ces conditions, que c’est à bon droit que l’administration a estimé qu’il avait été procédé à la transmission, non pas de deux branches complètes d’activités d’une valeur inférieure à 300 000 € relevant chacune du régime d’exonération totale, mais d’une entreprise individuelle dont la valeur totale des éléments transmis, comprise entre 300 000 € et 500 000 €, justifiait seulement une exonération partielle.
À noter. Comme souligné par le rapporteur public dans ses conclusions sous la décision de non-admission, dès lors que le fait générateur de la plus-value est constitué par une transmission d’entreprise, il apparaît logique d’apprécier la valeur des éléments transmis pris en compte pour le calcul des seuils en deçà desquels les plus-values sont partiellement ou totalement exonérées à l’échelle de l’ensemble de l’entreprise cédé, peu importe que ses différentes activités auraient pu être regardées comme autonomes si elles avaient fait l’objet de cessions distinctes, comme cela aurait pu être le cas si la cession des deux établissements avait été faite au profit de deux cessionnaires distincts.
CE (na) 3-10-2025 n° 501157 ; CAA Lyon 5-12-2024 n° 24LY00398
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